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Le cas d'une campagne de collecte à l'étranger. Le pacte d'entretien. La convention filmée

Transcription :

 ROSA : Jusqu’ici, nous sommes en train de parler dans un contexte français, de droit français. Mais notre institution travaille beaucoup avec des sources qui peuvent venir de l’étranger. Et nous faisons aussi des témoignages à l’étranger, avec un contact avec des cultures complètement différentes pour lesquelles n’est pas du tout compréhensible le texte que nous allons présenter pour signer. Donc on doit simplifier au maximum ce texte. Quel est ton conseil ?

ANNE LAURE : Les entretiens, qui sont collectés à l’étranger, s’ils sont collectés sur place… On suppose que le chercheur, le particulier, le salarié, va dans un pays étrange pour faire ses collectes. Il va à l’étranger, mais il revient en France et l’utilisation va avoir lieu en France et c’est sur le territoire français que s’applique la loi française, et donc celui qui mène la collecte doit , de toutes façons, en dernière fin , se poser la question : quelle est la règle de droit français qui va s’appliquer à moi, parce que ces mémoires que je sui en train de collecter, soit je vais les garder ou je vais les confier à un service d’archives, mais sur le territoire français. C’est ce droit là qu’il va falloir que je connaisse car c’est celui-là qui va s’appliquer. Ce sont ces règles de droit qu’on est en train d’étudier successivement, ce sont des règles de droit français. Cela dit, lorsqu’on va interroger des témoins dans un pays étranger, il faut évidemment prendre en compte la culture de ces personnes. La France est un pays de droit écrit, donc les autorisations qu’on va avoir, qui peuvent ne pas être très compliquées, ni très longues, ça peut facilement faire une page ou deux. Si on s’adresse à des personnes qui sont  peut être analphabètes ou qui vont peut être ne pas lire le français, même si on a fait traduire l’autorisation dans une autre langue, elles ne sont pas familières de cette logique très procédurière, très formaliste, il va falloir leur faire accepter un accord contractuel pas trop lourd, pas trop impressionnant. Si on leur présente un document de deux pages écrire en petit, elles vont s’enfuir en courant, en disant  « moi, je suis en confiance avec vous, mais là, vous me présentez un truc, ça me fout la trouille, je pars ! » Il faut faire un chemin vers les témoins pour obtenir son accord, parce que c’est nécessaire, c’est exigé par le droit français, mais faire que cet accord, on l’obtienne effectivement. Une solution peut être de simplifier un type, un modèle qui serait facilement passé auprès d’une personne en France, le simplifier, ne pas du tout le rédiger dans un langage jargonnant, et rédiger quelque chose de très fluide. De toutes façons ce sera mieux que rien, même si on n’a pas toutes les informations qui figureraient idéalement dans un document franco-français, ça sera mieux que rien, on aura quand même l’essentiel. Une autre façon de procéder, c’est de passer non pas par un document écrit et signé par la personne, mais un document qui paraitra moins formel, qui sera par exemple, le filmage, l’enregistrement audiovisuel de « je suis le témoignaire, celui qui interroge, le chercheur, le particulier qui est allé rencontrer quelqu’un et qui va expliquer : voilà, je suis en train de vous questionner sur telle ou telle de vos pratiques, je fais ça dans tel contexte, je vais rapporter cette vidéo, cet enregistrement sonore, pour en faire ceci, ça va être étudié dans mon labo, dans mon entreprise, dans mon association, on a envie de partager ça avec des gens sur internet ou pas, qu’est-ce que vous nous autorisez à faire ». Donc c’est expliqué et la personne va donner son assentiment à ce qui lui est expliqué, c’est filmé, c’est enregistré, on a la trace. Il n’y a pas de signature et en droit français, une signature manuscrite ce serait idéal, maison a la trace, la personne est très visiblement en train de do donner son accord, ça ira.

 ROSA : D’où l’importance aussi du pacte d’entretien, bien avant l’entretien, entrer en contact et là expliquer d’où on vient, qu’est ce qu’on va faire et c’est vrai que cette démarche audiovisuelle on y pense pas toujours.

ANNE LAURE : Oui c’est uen démarche utilisée par exemple par les ethnologues, dans les cultures qui n’ont pas de langue écrite.

ROSA : Culture orale.

ANNE LAURE : Absolument. Alors, le pacte d’entretien, ça pose la question de à quel moment expliquer ce qu’on est en train de faire, et ce n’est pas simplement « on s’est rencontrés et on s’entend bien et vous acceptez de vous confier à moi », le pacte d’entretien, ça formalise, et ça informe le témoin sur le contexte dans lequel ça se passe, et au-delà d’une rencontre entre deux personnes humaines. Le pacte d’entretien ça peut être un document écrit ou oral, un enregistrement audiovisuel, qui trouve sa place avant l’entretien. Ça peut être un document qui est réalisé après coup. Tout dépend du type d’enquête qu’on est en train de mener. Suivant que c’est une enquête sociologique où on collecte sans bien savoir ce qu’on va trouver ou si au contraire on a des idées très précises de ce qu’on va obtenir, le document à rédiger et le moment auquel on va le rédiger et obtenir l’accord de la personne ne va pas être le même. Il faut faire preuve de bon sens et savoir réagir. Si on se rend compte qu’on est en train d’obtenir beaucoup d’informations, et qu’on a déjà fait signer un pacte d’entretien très lapidaire et insuffisant, il faut savoir qu’il faudra revenir dessus et le compléter. Masi ça peut être bien de commencer par un document au début, qui sera complété après, ou alors on ne convient pas du contexte de l’utilisation de l’entretien au début, on attend de voir la tournure que ça prend et , une fois qu’on a identifié toutes les questions de droit, d’éthique qui ont été posées (cette personne m’a raconté tout sur sa vie et son village), il faut que je prenne ça en compte et que j’obtienne son autorisation, pour que je puisse réutiliser tout ça, et à ce moment là on rédigera un document en bonne et due forme après coup. Il n’y a pas de solution parfaite. On peut très bien décider pour rassurer la personne d’élaborer ce document au début, il y aura toujours moyen de le modifier ; Il faudra le modifier à la fin de l’entretien s’il y a besoin. Ne pas attendre qu’on soit éventuellement rentré en France, d’avoir travaillé dessus, et se dire « Ah tiens, là j’ai besoin d’une autorisation que je n’ai pas obtenue au bon moment, mais, bon la personne,  je ne l’ai plus. »

ROSA : Ce qui est intéressant parfois, si on travaille à l’étranger, c’est d’avoir des liens sur place. Dans notre cas, pour l’Algérie, il y a eu des associations qui nous connaissaient bien en France, et qui ont pu intervenir auprès des témoins pour expliquer en arabe, pour que ce soit à cent pour cent bien compris. Il faut des réseaux pour pouvoir travailler à l’étranger.

 ANNE LAURE : Oui à l’étranger ou dans certains milieux.




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