Le droit moral de l'auteur
Transcription :
ANNE LAURE : A condition de respecter le droit moral, car le droit moral comprend deux composantes. Le droit d’auteur est une somme du droit patrimonial et du droit moral, donc le droit patrimonial c’est ce qu’on vient d’évoquer, c’est ce qui a une durée limitée, c’est ce qui fonde mon droit à demander une rémunération ou pas et à dire « je veux bien que vous utilisiez ou pas pendant telle durée, dans tel territoire, dans tel contexte et sur tel ou tel type de support et à titre gracieux ou payant. Soixante dix années après ma mort, je ne peux plus mettre en place cette demande d’autorisation, ou plutôt mes ayant droit, mes descendants ne vont plus pouvoir demander ça à ma place parce que mon œuvre sera dans le domaine public et pourra être utilisée par tout le monde sans que mes ayant droit, mes descendants aient à accorder leur autorisation. Ca c’est le droit patrimonial. En tant qu’auteur j’ai une autre composante du droit d’auteur qui m’appartient et qui dure perpétuellement, qui ne s’éteindra jamais, c’est le droit moral. Et le droit moral comprend quatre règles :
D’une part le droit au nom, le droit de paternité. Quand on utilise une œuvre, une photo, une oeuvre audiovisuelle, un enregistrement sonore, on doit toujours mentionner le nom de son auteur. Le nom, le prénom, le pseudonyme si il y a un pseudonyme, mais il faut toujours mentionner le nom de cet auteur, même si l’œuvre est dans le domaine public.
Deuxième règle à respecter au titre du droit moral : la personne qui veut utiliser mon œuvre a l’interdiction de la dénaturer, de la modifier. Si j’ai fait l’enregistrement audiovisuel d’une personne et je suis satisfaite de l’archive, de la mémoire que j’ai collectée, donc c’est une vidéo qui fait dix minutes. Si quelqu’un peu t la modifier, l’intégrer dans un documentaire, un docu-fiction et faire un montage, la couper par exemple..
ROSA : ou la coloriser
ANNE LAURE :la coloriser tout à fait, on est d’accord ça modifie l’œuvre telle que moi je l’ai conçue, telle que moi je l’ai élaborée. J’ai voulu la mettre en noir et blanc, la technique me permet de la faire en couleur, j’ai choisi, j’ai assumé en tant qu’auteur de la faire en noir et blanc, personne n’a le droit de modifier, de la coloriser ou de la raccourcir, ou d’en enlever des passages parce qu’il y a peut être des passages un peu osés et que le public pour lequel l’utilisateur la destine le pousse à enlever certains passages. Ça modifie mon œuvre et moi en tant qu’auteur, je peux dire : « vous dénaturez mon oeuvre et donc je vous poursuis pour atteinte au droit moral. Tout utilisateur d’une œuvre qu’il veut modifier doit obtenir l’accord de l’auteur pendant qu’il est vivant, quand l’auteur est mort, l’autorisation des descendants.
Donc le droit moral comprend le droit au nom,( le droit de paternité, c’est la même chose), le droit à l’intégrité de l’œuvre, le droit au respect de l’œuvre.
Troisième prérogative que l’utilisateur doit respecter au titre du droit moral, c’est le droit de divulgation. J’ai élaboré une œuvre, un enregistrement, une oeuvre audiovisuelle, des photos, je pourrais très bien choisir de les garder dans ma mémoire d’ordinateur et que personne n’en connaisse l’existence. Moi seul , l’auteur de ces œuvres , peut décider qu’elles vont être mises sur internet. Sous réserve des autres personnes. Si j’ai obtenu l’autorisation du témoin que ça figure sur internet, je vais pouvoir le faire, mais je pourrais moi décider que ça doit rester secret. Si j’ai décidé que ces œuvres que j’ai élaborées ne vont pas être diffusées, personne n’a le droit de choisir de les divulguer. Et si je choisissais par exemple de verser des œuvres audiovisuelles, des vidéos que ‘ai tournées, dans une bibliothèque publique ou dans un centre de ressources à visée d’archives, je pourrais décider que mes œuvres ne vont pas être divulguées pendant dix ans, trente ans ou pendant … c’est moi qui décide, c’est moi qui fixe pare que je suis l’auteur. Et c’est à partir seulement de la date à laquelle j’aurai dit, mes œuvres peuvent être divulguées, c'est-à-dire portées à la connaissance du public, c’est à dire éventuellement publiées, mises enligne, qu’elles pourront être utilisées par d’autres personnes. Et ce droit de divulgation m’appartient à moi et personne ne peut divulguer ces oeuvres si j’ai exprimé une volonté contraire.
ROSA : c’est là que c’est intéressant quand un donateur donne à une bibliothèque sans avoir une connaissance approfondie de tous ses droits ; C’est justement l’institution surveille que tous ses droits soient respectés. Et c’est la raison pour laquelle nous sommes toujours le lien entre la personne qui exploite parfois et les donateurs. Et on doit surveiller à tout moment que ces droits soient vraiment bien respectés. J’ai plusieurs cas, notamment de la colonisation des archives, et toujours, il faut essayer d’arriver à des accords à l’amiable, avec celui qui l’a exploité, parce que ça ne sert absolument à rien d’arriver à des litiges et justement faire rencontrer le donateur avec celui qui l’a exploité et essayer un accord à l’amiable. A SCAM m’a bien conseillée dans ce sens là et je trouve qu’il y a toujours moyen de pouvoir être dédommagé sans entrer dans un domaine commercial.
ANNE LAURE :Justement du parle du donateur. Le donateur c’est celui qui se trouve détenir des archives et qui décide de les confier, de les verser à une bibliothèque publique, à un service d’archives. Il est donateur, mais d’où il les tient ? Ce donateur, il a le statut de donateur parce qu’il a les disques durs par exemple, sur lesquels figurent tous les enregistrements audiovisuels. Ce peut être l’auteur qui est donateur, puisque l’auteur a collecté tout ça et confie ça à un service d’archives. Ca peut être un héritier…
ROSA: oui l’ayant droit.
ANNE LAURE :Absolument. Un héritier de celui qui a collecté ces archives. Ca peut être l’employeur, l’administration, l’entreprise dans le cadre de laquelle les archives ont été collectées, qui détient ces supports et qui décide de les verser en les donnant par exemple. Le donateur peut être l’auteur des archives, le photographe, l ‘auteur de l’entretien sonore ou l’auteur de la vidéo ou pas ; Ce peut être quelqu’un qui se trouve les détenir. Et si le donateur, parce qu’il détient ces supports, les donne, il doit devoir se poser la question de « mais tiens, l’auteur de ces oeuvres dont je détiens les supports, est-ce que cet auteur m’autorise ou me permet de donner pour que ce soit par exemple divulgué ? » Le donateur ne doit pas se mettre à la place de l’auteur. Il est donateur parce qu’il décide que ses supports il ne va pas les garder chez lui. Mais ça laisse poser la question de qui exerce les droits d’auteurs, parce qu’il est réalisateur ou photographe ou auteur de l’entretien sonore.
ROSA : Bien sûr mais en même temps, généralement les gens qui détiennent des sources de ce type ou archives, dans mon cas c’étaient des ayant-droits, donc moralement ils se sentaient avec tous les droits de pouvoir les donner à la BDIC. Mais parfois ils donnent tout sans savoir qu’à l’intérieur même de ce don il existe des choses qui n’ont pas été produites par la personne qui soit-disant avait ce fonds. Donc c’est à nous de voir, qui, quel type de source appartient à qui, d’où est l’origine ; Et c’est une recherche, on doit isoler tout ce qui appartient à l’auteur et essayer de voir quelle est l’origine des autres sources . Parce que on sait très bien qu’on rentre dans tout un autre domaine, tout une autre démarche et que ça va bien plus loin. Les gens ne sont pas conscients de tout ça et la démarche est une démarche généreuse…
ANNE LAURE :… de la part des donateurs
ROSA : Ils ne se posent pas la question.
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