Le droit applicable à la captation dans un lieu privé
Transcription :
ANNE LAURE : Quelles sont les règles à respecter lorsqu’on utilise l’image de quelqu’un qui a été prise dans un lieu privé ? Les tribunaux distinguent deux types de responsabilités, deux types d’obligations à respecter. La personne qui est photographiée ou filmée dans un lieu privé au sens du droit à l’image, il faut obtenir son accord, si on veut capter cette image, donc la prendre, et a fortiori la réutiliser. Si on n’obtient pas l’accord et idéalement l’accord écrit, formalisé de la personne photographiée ou filmée dans le lieu privé, cette personne pourra toujours dire après coup « écoutez, je savais que j’étais photographiée ou filmée, j’étais d’accord, mais je pensais que c’était pour cet entretien entre nous, je ne pensais pas me retrouver sur internet , je ne pensais pas me retrouver sur Youtube ou Dailymotion, je ne pensais pas me retrouver sur Facebook , donc cette personne pourra toujours, si elle estime que sa vie privée a été violée, engager une procédure contentieuse contre celui qui a pris les photos ou fait l’enregistrement sonore ou audiovisuel et il est probable que les tribunaux condamneront la personne qui ne peut pas attester du fait que la personne avait autorisé l’utilisation de l’image. Et qu’est-ce qu’elle risque la personne qui a collecté sans autorisation, sans obtenir l’accord formel de la personne photographiée ou filmée ? La personne qui a collecté peut être condamnée à des dommages et intérêts, c’est à dire le versement d’un montant qui va réparer le préjudice subit par la personne pour atteinte à sa vie privée.
Ca c’est le premier type de responsabilité sur lequel on peut se voir engagé en tant que collecteur. Responsabilité civile : j’ai causé un dommage à quelqu’un, j’ai porté atteinte à sa vie privée, je l’indemnise, je lui verse de l’argent. Je peux, en tant que collecteur, être poursuivie, être condamnée, à un autre titre : au titre de la responsabilité pénale. Là je ne vais pas verser de l’argent à la personne, je risque éventuellement d’être condamné pour avoir enfreint une règle du code pénal. Il se trouve que dans le code pénal, en France, il y a un article qui dit qu’on n’a pas le droit de capter l’image de quelqu’un et a fortiori d’utiliser l’image de cette personne - photographie ou film-sans l’autorisation de cette personne, sauf si on peut présumer son consentement. Donc, si on peut présumer son consentement - la personne me regarde devant l’appareil photo ou la caméra, ravie- je ne serai pas condamnée pénalement. Donc je ne risque pas d’être condamnée à de la prison (un an de prison maximum) ou à une amende (45000 euros d’amende maximum). Si en revanche la personne est en train visiblement de se défendre, de se protéger d’être photographiée ou filmée, là je risque, moi, collecteur, d’être condamnée au pénal et je risque jusqu’à un an de prison ou 45000 euros d’amende, bon, il faut vraiment que j’ai fait quelque chose de très grave. C’est fixé par la loi.
Lorsqu’on collecte, qu’on fait des enregistrements sonores, audiovisuels, qu’on fait des photographies dans le cadre d’une collecte de mémoires, les personnes sont quasi systématiquement, ou alors c’est plus de la collecte de mémoire, les personnes sont toujours bienveillantes et accueillent la personne qui interroge. On n’encourt pas de responsabilité pénale lorsqu’on on collecte et qu’on diffuse leur image sans leur accord. Mais, on encourt toujours une responsabilité civile, parce que la personne a peut être accepté d’être photographiée ou filmée à un certain moment, mais elle n’avait pas imaginé que ça irait jusque là et qu’on ferait ça de son image. Donc elle pourra dans tous les cas si elle le souhaite, a posteriori, alors qu’elle était d’accord pour le film ou la photo, nous poursuivre, nous collecteurs, au titre de la responsabilité civile pour atteinte à la vie privée. Et c’est pour ça qu’on a intérêt, quand on collecte et qu’on est en toute confiance avec la personne, on a intérêt quand-même à formaliser, soit en filmant l’accord obtenu de la personne, soit pas écrit, les conditions dans lesquelles on va pouvoir réutiliser les photos ou les films ou les enregistrements sonores qu’on prend de cette personne.
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