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Les méthodes de recueil de parole de Kokoya

Transcription :

Claire : qu’est-ce qu’il y a comme thèmes par exemple, que vous avez pu…

 

Isabelle : Alors c’est très varié. On a travaillé dans le cadre de la Solidarité Internationale* deux fois, sur deux formes complètement différentes La première fois on avait interviewé, sur le thème que traitait la Solidarité Internationale à ce moment là, on avait interviewé les différents acteurs de la Solidarité Internationale, et on avait rejoué ces personnages, donc ça avait été théâtralisé, et en tant que Fol’reporters on allait au devant des gens demander ce qu’ils pensaient de ce qu’on venait de leur montrer. Donc  c’était une parole des gens jouée théâtralement qui permettait aux autres, donc aux spectateurs, ensuite,  de donner leur propre avis, ressenti sur ça. Donc on avait interviewé aussi bien les spectateurs que les élus, que les organisateurs. La deuxième fois, c‘était sur un autre thème. Ils souhaitaient avoir le point de vue de la population sur un certain nombre de sujets . Donc en tant que Fol’ Reporters, on était quatre, donc par binôme, on allait interviewer les gens, mais toujours en leur présentant un spectacle avant. Notre idée c’est toujours : on donne quelque chose et après on va demander quelque chose.

 

 

 

Claire : Dans votre activité, on a le témoignage, on a la parole et on a le théâtre, comment ça s’articule ? Est-ce qu’il y a quelque chose de plus important que l’autre ? Est-ce que l’objectif, c’est la parole ? Est-ce que c’est le théâtre ou est-ce que les deux ont chacun une partition à jouer ?

 

Isabelle : Alors tout est important, le théâtre est au service de la parole des gens mais cette parole qu’on récolte, elle doit pouvoir être théâtralisée. Par contre on ne transforme jamais la parole des gens. C’est très important pour nous de respecter non seulement la parole, de la respecter aussi dans sa formulation et surtout de ne pas l’utiliser à d’autres fins que celle pour laquelle on interview les gens. C’est-à-dire qu’on veut savoir ce qu’ils ont à dire sur tel ou tel sujet ou si on raconte un morceau de leur vie. Parce que ça dépend après…là on a parlé des fol’s reporters mais dans la partie plus artistique, on va dire, qui est ce fameux théâtre plutôt hors les murs mais qu’on essaye quand même de jouer au théâtre ; donc là les interviews sont à la fois…répondent au thème qu’on a voulu aborder. Par exemple, on a fait 3 spectacles sur des femmes : le premier était « femme d’ici et d’ailleurs » donc ça concernait des femmes immigrées. Donc à chaque fois on interviewait au moins 5 continents différents et sur une période historique qui allait de l’après-guerre à nos jours, de façon à toucher plusieurs vagues d’immigration. Le deuxième volet c’était des jeunes filles nées ici, de parents immigrés, donc pareil 5 continents, enfin d’origine des 5 continents…Quand tu dis « jeune fille », je rigole toujours un peu…oui, il y en a qui avait 80 ans mais c’est des enfants en fait, issus de…voilà ! La première dame était une immigrée italienne, donc elle avait 77 ans et donc elle était née ici de parents immigrés italiens. Mais après on avait par exemple une jeune fille chilienne qui elle avait 19 ans et donc d’une autre phase d’immigration, on avait des africains, enfin bref, voilà…Le troisième volet, c’était sur des femmes françaises alors toujours sur la période de l’après-guerre à nos jours ; donc ça s’appelait « née femme ». Voilà le parcours de la femme française dans son histoire. Alors à chaque fois, ça va de l’après-guerre à nos jours pour qu’on touche aussi des tranches d’âge différentes, pas seulement des migrations différentes, mais des tranches d’âge différentes. Dans ce sujet-là, la parole des gens…toutes les questions posées tournaient autour de ce sujet-là. Un interview ne dure jamais plus d’une heure et les questions sont préparées puisque l’on a besoin de récolter un certain nombre d’informations et la façon qu’on a aussi de construire ce questionnaire, c’est en général 5 questions, pas beaucoup plus…5, 6 questions. Parce que le but c’est de laisser parler les gens mais c’est de pouvoir récolter une parole qui sera théâtralisable. Alors qu’est-ce que ça veut dire « théâtralisable » ? ça veut dire qu’il faut que les gens nous racontent des choses précises : « j’étais à tel endroit, j’ai rencontré untel, il m’a dit ça, j’ai répondu ça, du coup j’ai fait ça et puis on est allé là » Voilà. Donc c’est des choses qui ensuite pourront donner lieu à des situations théâtrales avec des personnages, avec un temps, un lieu, une heure…c’est pas du discours…parce que le discours, on peut pas en faire grand-chose. Alors, j’ai un souvenir précis qu’on nous avait demandé de travailler sur un sujet qui nous paraissait au début assez bizarroïde à mettre en théâtre, ça s’appelait : la démocratie participative. Quand on nous a demandé un spectacle là-dessus, c’était au début un projet et on ne savait pas ce qu’on allait faire, donc Isabelle a proposé le théâtre témoignage pour se baser sur des histoires vraies…donc il y avait des élus, des associations, des citoyens et des agents territoriaux. Effectivement, c’était le début de la démocratie participative, c’était en 2005-2006. C’était quand même une bête étrange, la démocratie participative, surtout à l’époque…mais vu à travers cette petite forme de théâtre témoignage, ça a éclairé tellement de gens sur le sujet qu’on s’est vraiment aperçu que c’était très porteur. Oui, parce que c’est toujours des expériences concrètes, c’est des expériences de vie, donc ça amène le côté universel. C’est-à-dire qu’à partir d’un cas privé finalement, on rencontre l’universalité des problématiques humaines tout simplement. Alors c’est vrai comme dit Yvette, même sur un sujet comme la démocratie participative puisque les gens racontaient leurs expériences de démocratie participative avec les difficultés qu’ils avaient rencontrées, les victoires qu’elles avaient remportées, enfin voilà…et du coup on a tous les acteurs à chaque fois : on a la personne qui raconte son expérience et puis ceux qui ont été témoins de ça, qui ont participé ou ceux qui ont été les interlocuteurs…voilà, donc ça met toujours en jeux tout le panel, en fait…


*Association Solidarité Internationale à Vitry-sur-Seine.




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